La réforme de l’assurance chômage de 2019. Six ans plus tard, le constat est accablant !

Cette réforme était pourtant initialement présentée comme un moyen de lutter contre les contrats courts. Elle n’a en réalité servi qu’a faire exploser le nombre de ce type de contrats et a favorisé une augmentation massive de la précarité.
Ce constat n’est pas un constat CGT. Il est le résultat du travail de la Commission de l’évaluation de la réforme de la Dares (institut statistique du ministère du travail) dans son rapport publié le 3 avril 2025.
Cinq équipes universitaires ont étudié qualitativement et quantitativement les effets des mesures mises en place entre 2019 et 2021.
Ces mesures ont tour à tour baissé le montant des allocations en changeant le mode de calcul du salaire journalier de référence, rendu plus difficile l’accès à l’ouverture des droits (en passant de 4 à 6 mois la période nécessaire) et instauré un système de bonus-malus sur
les cotisations pour les employeurs abusant de contrats courts et donc précaires. C’était d’ailleurs le but affiché par le gouvernement de l’époque : faire la chasse aux contrats précaires. « Le système actuel dysfonctionne car les règles d’indemnisation incitent trop souvent au
maintien d’emplois précaires, et pas suffisamment au retour à l’emploi », martelait le premier ministre Édouard Philippe.
Objectif raté car s’il était avéré qu’un retour à l’emploi était plus plausible avec autant de mesures coercitives, on est forcé de constater que la nature de ces contrats n’a pas changé.
Le rapport de la Dares est sur ce point limpide : « Les évaluations de la réforme du SJR ne mettent pas en évidence d’effet sur la reprise de contrats durables. »
Même l’Unedic l’organisme gestionnaire de l’assurance chômage précise : « La hausse de l’accès à l’emploi est portée intégralement par la reprise de CDD et de contrats d’intérim de moins de six mois » mais l’UNEDIC ne voit « aucun effet significatif » sur des contrats de plus de six mois « ni sur la reprise de CDI ».
Que ce soit sur le montant des allocations, avec une baisse moyenne de 18%, ou sur la durée de chômage plus courte avec une baisse de 12%, la réforme était délétère pour les travailleurs mais au regard d’une analyse qualitative des emplois on ne peut que s’inquiéter davantage. En effet selon le rapport de la Dares : « Les demandeurs d’emploi aux parcours fractionnés ressentent une pression accrue à retrouver un emploi du fait de difficultés financières, soulignent les auteurs du rapport. Pour retrouver un emploi rapidement, ces
demandeurs d’emploi aux parcours discontinus déclarent plus systématiquement être disposés à accepter des emplois sous-qualifiés. » On observe que les conditions de travail se dégradent également. « L’instabilité existe sous la forme d’horaires imprévisibles d’une
semaine sur l’autre et d’une saison sur l’autre, d’horaires décalés, de jours de repos imposés lorsque l’activité reflue ».
Nous ne pouvons que s’insurger contre ces conditions imposées à des travailleurs qui sous une pression et angoisse permanente doivent accepter de devenir corvéables à souhait, sont obligés d’accepter les conditions imposées par le patronat qui d’ailleurs ne se cache pas et
explique que « Le recours aux contrats courts [est] invoqué pour gérer une production à flux tendu. »
Les employeurs restent en revanche évasifs sur la mesure bonus-malus qui devait faire baisser le nombre de contrats courts. En effet une étude menée entre sep 2022 et août 2023 montre une baisse de 1,3% soit un jour par trimestre !!!
Un autre effet pervers observé de cette réforme, qui frappe plus particulièrement les jeunes, est l’éloignement des services de France Travail par suite du passage de quatre à six mois la durée nécessaire pour l’ouverture des droits.
La Dares précise dans son rapport que cette mesure : « a eu un impact négatif et significatif sur la probabilité d’inscription à France Travail dans les deux mois suivant la fin de contrat », et que par conséquent : « Ces demandeurs d’emploi jeunes aux parcours précaires ne
bénéficient alors pas de l’accompagnement dispensé par France Travail en matière de formations comme de mise en relation avec les entreprises. »
Il semble nécessaire d’ajouter à tout cela le fait que la complexité croissante des démarches de plus en plus dématérialisée est à l’origine des cas de non-recours. Sur ce point l’étude de la Dares est sans équivoque : « Le non-recours à l’assurance-chômage est un phénomène
structurel important en France, peut-on lire. Il représenterait de l’ordre d’un tiers des fins de contrat éligibles [et] serait particulièrement important pour les fins de CDD et les personnes ayant des durées cotisées faibles. »
Malgré ses effets néfastes et mortifères sur l’existence des plus précaires, le gouvernement a continué en 2023 avec une nouvelle réforme qui mettait en cause cette fois la durée de l’indemnisation en la diminuant de 25%.
Pour la Cgt il est temps de déclarer la guerre au chômage et mettre fin à celle engagée contre les chômeurs !!! Pour poursuivre sur le sujet :
https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/040425/assurance-chomage-la-reforme-de-2019-n-genere-aucun-emploi-durable-mais-renforce-la-precarite
Pour le comité TPPE 65
Ahmad Asgari